6/10Vengeance

/ Critique - écrit par riffhifi, le 23/05/2009
Notre verdict : 6/10 - Sans pâté pour M. Vengeance (Fiche technique)

Tags : vengeance venger francais synonymes justice dictionnaire traduction

Johnnie et Johnny s'allient pour un "Charles Bronson à Hong Kong" plutôt primaire mais pas dépourvu de panache. Sa présence en compétition à Cannes reste pourtant assez mystérieuse.

On ne peut pas dire que Johnny Hallyday soit un nouveau venu sur le grand écran. Le rocker a promené sa carcasse dans le western italien dès les années 70 (Le spécialiste), et s'est fait remarquer dans le polar (Détective de Jean-Luc Godard en 1985), le drame (L'homme du train, qui lui vaut le prix Jean Gabin en 2003), la comédie égotiste (Jean-Philippe, où il joue l'homme qu'il aurait été s'il n'avait pas été Johnny), la comédie policière américaine (Wanted, La Panthère Rose 2)... Les historiens se rappellent même que sa première apparition date de 1955, dans Les diaboliques de Clouzot où il jouait un élève. Mais de mémoire de cinéphage, c'est bien la première fois que Johnny joue dans un film hongkongais ! C'est à son demi-homonyme Johnnie To, cinéaste prolifique qui affiche un rythme moyen de deux films par an, que l'on doit ce Vengeance actuellement en compétition au festival de Johnny a toutes les cartes en main
Johnny a toutes les cartes en main
Cannes. On jaunit à l'idée de voir la rock-star sexagénaire casser des gueules sous la pluie à coups de crosses nacrées, mais la présence derrière la caméra d'un cinéaste plein de surprises laisse le bénéfice du doute.

L'histoire, on la connaît rien qu'en regardant l'affiche : Francis Costello (Johnny Hallyday) est cuisinier ; "ils" ont tué son beau-fils, ses petits-enfants, et ont voulu tuer sa fille (Sylvie Testud) : monumentale erreur. Boum !

« I am a chef. »

Outre le nom ridicule de son personnage et le côté "Steven Seagal" de sa profession (le titre Piège à Hong-Kong était déjà pris), le film de Johnnie To est un aimant à clichés où l'on retrouve pêle-mêle le caïd redoutable (Simon Yam), l'indic pittoresque et les gunfights scrupuleusement réglementés, sans oublier la dimension « I am a total stranger here » qui rappelle à quel point Gene Hackman avait l'air gland à Marseille dans French Connection 2. Mais après tout, ce qui peut être considéré comme un cliché a parfois valeur de code, et Vengeance assume pleinement d'être un film de genre unidimensionnel, construit comme les classiques du Charles Bronson de la "grande époque" : L'enfer de la violence, Un justicier dans la ville et ses suites, etc. Le concept est simple :

1. des méchants foutent le Bronx.
2. Le gentil les bute tous jusqu'au dernier.

Johnnie To aime aussi le cinéma de Jean-Pierre Melville (il prépare d'ailleurs un remake du Cercle rouge avec Liam Neeson, Chow Yun-Fat et Alain Delon en personne), et se réjouit donc de pouvoir affubler son acteur français d'un imper fatigué et d'un chapeau mou rétro.

Fais-toi mal, Johnny Johnny Johnny
Fais-toi mal, Johnny Johnny Johnny
Pourtant, le film décolle occasionnellement de son statut de série C mille fois photocopiée. Grâce au talent certain du réalisateur pour fignoler de belles scènes de duels rageurs, grâce à sa volonté de faire bifurquer régulièrement le polar vers le western. Grâce à un twist de mi-parcours, qui manque plusieurs fois de faire sombrer l'histoire dans le ridicule mais offre quelques modestes pistes de réflexion sur le sujet de la vengeance. Et surtout grâce à un casting qui ne laisse pas Johnny seul en piste, loin s'en faut : le trio de gangsters qu'il enrôle pour l'accompagner (interprété par Suet Lam, Ka Tung Lam et Anthony Wong) vole largement et souvent la vedette à notre compatriote un peu largué. Reste qu'on se demande ce qui a bien pu motiver les organisateurs du festival de Cannes pour mettre en compétition un film de genre aussi limité, en dehors de la volonté de reconnaître en Johnnie To un cinéaste asiatique important.