8.5/10Tellement proches

/ Critique - écrit par riffhifi, le 18/06/2009
Notre verdict : 8.5/10 - Ces autres jours heureux (Fiche technique)

Tags : film toledano tellement eric proches cinema jean

Le duo de réalisateurs-scénaristes révélé par Nos jours heureux récidive dans la comédie nostalgique, généreuse, inventive et hilarante. Les acteurs sont au poil, mais c'est essentiellement grâce au scénario et aux dialogues que le film fonctionne.

Les deux inséparables Eric Toledano et Olivier Nakache ont commencé par court-métrager, avant de sortir leur premier long Je préfère qu'on reste amis en 2005, avec Gérard Depardieu et Jean-Paul Rouve. Passé inaperçu, il leur permet néanmoins de livrer dès l'année suivante une franche réussite appelée Nos jours heureux, une histoire de colonie de vacances qui déjouait les pièges du genre en y injectant une fraîcheur et une sincérité bien agréable. Cette année, le duo s'attaque au thème de la famille, et Vincent Elbaz remplace Jean-Paul Rouve au poste de personnage central.

Septembre 1993. Alain (Vincent Elbaz) est marié à Nathalie (Isabelle Carré), avec
qui il a deux enfants, le dernier-né Prosper et le turbulent Lucien. Il a du mal à tourner la page de son proche passé de G.O. au Club Med, et reste un grand enfant au sens des responsabilités peu aiguisé. Son beau-frère Jean-Pierre (François-Xavier Demaison) est un avocat de petite envergure, qui forme avec sa femme Catherine (Audrey Dana) un couple étriqué et conformiste, soucieux d'éduquer leurs enfants comme de véritables singes savants. Troisième morceau de la fratrie, Roxane (Joséphine de Meaux) vient de rencontrer Bruno (Omar Sy) et entend bien ne pas lâcher sa prise. On a fait le tour ? Non, pas tout à fait, mais le film y arrive très bien.

En étant cynique, on pourrait reprocher pas mal de choses à cette "comédie de la semaine", bâtie de façon sensiblement identique à Nos jours heureux (on plonge une fois encore dans un passé proche pour y puiser un maximum de nostalgie), usant de thèmes archi-rebattus (la famille c'est difficille, le travail c'est durail, le racisme inconscient c'est pas du flan), offrant à Vincent Elbaz un rôle d'éternel ado qu'il semble avoir endossé trente fois et grattant sans vergogne la corde mélodramatique en faisant verser leur larmichette aux protagonistes dans les moments poignants. Mais la recette ne prétend pas innover, façon cuisine du monde où les nems au poulet côtoient la salade César dans une large assiette blanche branchouille. C'est en brassant fermement les sujets les plus revus, les situations les plus fréquentes, que Toledano et Nakache trouvent leur propre ton, fait de justesse et de finesse. Le scénario, malin, s'appuie avec bonheur sur les parallèles pour décupler les effets : lorsqu'il s'agit d'aller dîner chez le beau-frère, Alain et Bruno tentent chacun de leur côté d'éviter la corvée avec une énergie qui Lucien a la banane
Lucien a la banane
rend le film irrésistible dès le début ; une famille de Pakistanais se met à camper chez Alain et Nathalie tandis que la demeure de Jean-Pierre et Catherine devient progressivement et contre toute logique un lieu de cérémonie juive ; les rapports amoureux se dégradent et se rafistolent cycliquement dans chaque couple... Les dialogues, ciselés avec soin, sont restitués par une brochette d'acteurs attachants parmi lesquels on commence déjà à distinguer une famille issue des précédents films du duo (Joséphine de Meaux, Jean Benguigui, Omar sans Fred, Lionel Abelanski) ; les ramifications du scénario permettent d'inviter un Arsène Mosca toujours sympa et une impayable Renée Le Calm de 91 ans, aussi alerte que dans ses premières apparitions chez Klapisch (à 75 ans, quand elle n'était encore qu'une frêle jeune fille).

Hilarant dès ses premières scènes, Tellement proches le reste durant la majeure partie du film, tout en ménageant des plages d'émotion d'une belle sincérité. Les personnages partaient tous d'une caractérisation un peu grasse, qui mettait en avant les plus vilains de leurs défauts, et se révèlent de plus en plus humains à mesure que le film avance, rappelant que les réalisateurs sont aussi fin observateurs que francs optimistes sur la nature humaine. Le plaisir est entier jusqu'au final qui, sans forcer, tirera peut-être une grosse larme réjouie à votre voisin. Parce que bon, tss, vous n'allez pas admettre qu'il en coule une sur votre joue.