8/10Nés en 68

/ Critique - écrit par nazonfly, le 25/05/2008
Notre verdict : 8/10 - Jeunes femmes rouges toujours plus belles (Fiche technique)

Tags : film catherine olivier jacques martineau ducastel casta

L'évolution de la société française depuis Mai 68 sous le regard de Laetitia Casta. Une bien belle mise en forme.

Si, par hasard, vous êtes passés à côté des quarante ans de mai 68, c'est probablement que vous êtes sourds ou aveugles. Ou que vous vivez en ermite quelque part dans le Larzac. Du coup vous n'irez sûrement pas voir Nés en 68. De toute façon, entre le bel Harrison Ford dans Indiana Jones 4 et Laetitia Casta dans le film de Olivier Ducastel et Jacques Martineau, vous avez fait votre choix. Etrange, mais que voulez-vous...

Le combat est père de toute chose. (Héraclite)

Nés en 68 débute en cette fameuse année, par une réunion d'étudiants prêts à tout pour changer cette société dans laquelle ils ne se reconnaissent pas. Une bande de copains parisiens se réclamant d'égalité, de droits des femmes, d'amour libre dans une candeur presque risible de nos jours. Autant d'idées qu'ils tenteront de mettre en application en s'installant en communauté dans une ferme dans le Lot (les communautés marchent toujours bien mieux dans le sud, c'est un fait reconnu). Une fois les premiers jours de bonheur passés, des dissensions apparaissent, la communauté vacille.

J'ai quelque chose à dire mais je ne sais pas quoi

Ca commence comme une remise en cause de la société prônée par certains soixante-huitards : non, les communautés peace and love ne peuvent pas fonctionner. Et l'on se dit qu'il est étrange et plutôt rare d'avoir cette vision au cinéma. Puis le film étend ses ailes, se développe. Il quitte le nid originel des événements de Mai pour survoler tous les grands événements de ces quarante dernières années : l'idéalisme des plus extrêmes apôtres de 68 récoltant la mort et la prison, les promesses et espoir de l'élection de Miterrand, le choix de Chirac à contre-coeur en 2002, la reconnaissance de l'homosexualité, le SIDA et son cortège funèbre de scandales, de douleurs et de morts, le mariage et le divorce, l'attentat du 11 septembre. Jusqu'aux propos de Nicolas Sarkozy rejetant la pensée et l'influence de Mai 68, tombant à point nommé pour clore ce film.

Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend

Mais Nés en 68 n'est pas un documentaire. Olivier Ducastel et Jacques Martineau auront choisi de montrer l'Histoire par le petit bout de la lorgnette, celle de la vie d'une femme. L'élément central de cette peinture de l'histoire est, en effet, Catherine, magnifiquement interprétée par Laetitia Casta. Elle vivra l'idéal de Mai 68 à sa manière et restera dans cette ferme du Lot jusqu'à sa mort, vivant de commerce de fromage de chèvre. Un personnage de femme forte qui demeurera insoumise et rebelle jusqu'à ses derniers jours, sublime personnification du mouvement. Un personnage éternel sans cesse réincarné. L'ancienne top model trouve un rôle à sa mesure et semble naturelle dans chaque plan, au contraire d'autres acteurs au jeu parfois hésitant.

Ils pourront couper toutes les fleurs, ils n'empêcheront pas la venue du printemps

Nés en 68 n'est pas un film sur Mai 68, mais un film sur la société post-soixante-huitarde, sur les conséquences de l'idéologie libertaire qui se ressentent encore de nos jours. Prendre le parti de l'intimité, du prisme d'une femme et de son entourage pour faire une leçon d'histoire est peut-être critiquable. Les émotions, la tristesse, souvent poignante, sont-elles à leur place ? Le débat est ouvert. Mais ce qui est certain, c'est que l'héritage de Mai 68, même déformé, même transformé, est là. Et que même si les petites fleurs Peace and Love paraissent un peu ridicules et désuettes, elles ont eu une influence certaine sur la société française.