9/10Mulholland drive

/ Critique - écrit par Filipe, le 29/01/2002
Notre verdict : 9/10 - Hein? (Fiche technique)

Tags : film lynch mulholland drive david betty rita

A Hollywood, la ville de tous les rêves, la ville de tous les cauchemars, une jeune femme séduisante, Rita, est victime d'un terrible accident de voiture sur la célèbre Mulholland Drive.

Une autre jeune femme nommée Betty, sensible et innocente, arrive à Los Angeles pour devenir une grande actrice. Arrivée chez sa tante Ruth, partie pour un temps, elle tombe sur Rita, frémissante, qui est devenue amnésique.

Mulholland Drive, c'est le un des rejetons de David Lynch, primé pour sa mise en scène au festival de Cannes en 2001. Mulholland Drive, c'est un film qui devait d'abord être une série sur ABC. Puis les Studios Canal+ ont persuadé Lynch de transformer ses projets en un long-métrage, qui finalement sera bel et bien conçu, pour le plus grand bonheur des fans du réalisateur, qui depuis Twin Peaks ne parvenait cependant plus à convaincre.

Et que dire du film proprement dit? Eh bien pas grand chose aux premiers abords. Nos yeux nous font vivre une aventure complexe, sombre et glaciale. Betty, surprenante de naïveté et de gentillesse, tente de rendre à Rita son passé. Et Rita, surprenante de grâce, au physique tout droit sorti des superproductions américaines, se laisse à suivre sa nouvelle amie, qui l'hébergera et la soutiendra tout au long de sa peine, de son calvaire. Sans passé, contrainte de se forger une nouvelle personnalité, elle ne peut se fier qu'à Betty dans le monde hollywoodien où corruption et trahisons en tous genres sauraient définitivement l'anéantir.

Seulement voilà, l'histoire n'est absolument pas celle-là, du moins il ne faut pas focaliser de façon "superficielle" sur cette façade, cette aventure de deux femmes perdues à Los Angeles. Car la réflexion est toute autre. Et cette réflexion est dissimulée et les propos du réalisateur, de celui qui imagina à d'autres époques Twin Peaks, Lost Highway ou encore Sailor et Lula, sont en filigrane, masqués mais pourtant si évidents.

Et l'incompréhension ressentie par la majorité du public après une première visualisation de l'oeuvre est tout à fait compréhensible. Et il n'est pas étonnant de voir sur Internet bon nombre de forums où sont présentées quantités d'interprétations de Mulholland Drive, car Mulholland Drive est une déferlante de détails qui sont à la base d'une réflexion ambiguë. Ces détails sont omniprésents: souvent saugrenus, présentés de façon imagée, ils font le charme du film.

Le polar labyrinthique qu'est Mulholland Drive nous emmène au coeur d'un monde impitoyable: celui d'Hollywood, où tout peut arriver. Il nous emmène en plein coeur du monde du cinéma et des acteurs, dans ce monde si superficiel de la création et de la théâtralité. Il nous fait partager les craintes des jeunes acteurs et l'anxiété des réalisateurs, mêmes populaires. Il nous montre l'envers du décor, les messes basses et les compromis occultes, l'argent qui circule de mains en mains. Et tout ceci pour nous prouver qu'Hollywood est un monde corrompu qu'il est préférable de ne pas connaître, au risque de corrompre également sa propre personne.

Outre cette myriade d'événements qui comblent deux heures et demie d'animation subjuguante et sans arrêt interloquante, la qualité d'image est sensationnelle et l'idyllique physique de Laura Elena Harring -Rita- et le charme que dégage si naturellement Naomi Watts -Betty- y sont certainement pour beaucoup. 

Quant aux musiques, signées Angelo Badalamenti, elles sont une fois de plus prodigieuses. Rappelons que depuis Blue Velvet(1986), David Lynch a toujours fait appel à ce compositeur pour réaliser les bandes-son de ses oeuvres, d'où l'extrême justesse de l'ambiance musicale créée pour le film.

Ce film va certainement vous émoustiller et vous pousser à le revoir une seconde ou un troisième fois. Chef oeuvre incontestable du cinéma mondial, Mulholland Drive est un véritable phénomène de société. Et David Lynch s'affirme comme étant l'un des très grands réalisateurs et scénaristes de l'Histoire du film: Merci Monsieur, de renouveler aussi efficacement le Septième Art.