9/10Krull

/ Critique - écrit par riffhifi, le 23/12/2007
Notre verdict : 9/10 - Un film qui (j’ai honte) krull sous les qualités (Fiche technique)

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Un oublié des années 80, perle alternative de l'heroic fantasy qui n'a pas su trouver son public en son temps.

Il y a des films comme ça, qui marquent l'enfance ou l'adolescence d'une poignée de personnes plus que la mémoire collective des cinéphiles. De ces films qu'on découvre sur M6 un soir, par hasard, en dépit d'un titre inconnu et abscons, et qu'on passera sa vie à revoir avec un plaisir sans cesse renouvelé, dû à la fois à la qualité de l'œuvre et à la relation intime que l'on entretient avec l'objet rare. Krull fait partie de ces curiosités, dans la veine « heroic fantasy mâtinée de space opera à la sauce eighties », une veine si improbable qu'on se demande par quel miracle le résultat peut être aussi jouissif...

L'histoire est contée par Ynyr (Freddie Jones, pilier de Hammer Films dans les années 60-70), un vieux sage à la Gandalf Kenobi qui se sait chargé d'aider le jeune roi Colwyn à retrouver sa promise Lyssa, enlevée par la Bête le jour de leur mariage. Il faut dire que la Bête est une entité extraterrestre particulièrement moche, à la tête d'une armée de soldats sur-équipés. Colwyn aura donc besoin de Les sex-toys, c'est de pire en pire...
Les sex-toys, c'est de pire en pire...
toute l'aide qu'il pourra trouver sur son chemin : une troupe de voleurs, un Cyclope géant, un demi-magicien maladroit, goinfre et arrogant...

Au pays de l'heroic fantasy alternatif, Krull se situe à la croisée de plusieurs chemins, ce qui explique sans doute son insuccès : production ni complètement fauchée ni suffisamment coûteuse (les effets spéciaux se tiennent globalement bien pour l'époque, mais certains décors font carton-pâte), public mal défini (le sujet est d'une fraîcheur enfantine mais aborde des thèmes de fond plutôt adultes et le traitement flirte régulièrement avec le cinéma d'horreur), quasi-absence de stars au générique (Liam Neeson n'était qu'un second couteau anecdotique en 1983), production britannique aux visées clairement hollywoodiennes... Le film est si bâtard dans sa conception qu'il fait partie de ceux qui ne doivent leur réussite ni à leur scénariste (Stanford Sherman, ancien habitué de la série télé Batman), ni à leur réalisateur (Peter Yates, à qui on doit tout de même Bullitt avec Steve McQueen), ni à leurs acteurs, mais à une pincée de magie, à une bonne fée amoureuse du cinéma. Où est Liam Neeson ?
Où est Liam Neeson ?
Fourmillant d'idées incongrues mais marquantes (le Glaive, sorte de shuriken à lame rétractable), sublimant quelques figures classiques du film d'aventures, Krull se plie au récit classique en forme de quête initiatique pour en faire non seulement une suite d'épisodes trépidants ou émouvants (très peu de personnages survivent au voyage, c'est une boucherie assez inhabituelle), mais également une intéressante et subtile réflexion sur le rapport que le héros entretient avec sa future femme. La Bête n'est-elle pas la projection de Colwyn au moment de son mariage, prêt à épouser une femme parce qu'il en a le pouvoir et l'envie, sans prendre le temps de la mériter et de lui prouver son amour ? Le message est simple mais l'approche assez rare, et la fin joliment symbolique.

Toute tentative d'analyse mise à part, Krull se distingue essentiellement par son imagerie fabuleuse, aussi bien dans les visions surréalistes que la Bête offre à sa prisonnière que dans l'antre de la Veuve Noire, immense toile d'araignée aussi fascinante qu'oppressante. Porté par la musique du jeune James Horner, qui signe sans doute là son meilleur travail (ouais parce que Titanic, ça se retient bien mais c'est guimauve...), le film propose un des divertissements les plus enthousiasmants des années 80, une alternative sincère et originale à un film plus commercial comme Willow...