7.5/10Le dernier trappeur

/ Critique - écrit par Vincent.L, le 14/12/2004
Notre verdict : 7.5/10 - L'homme est un animal comme les autres (Fiche technique)

L'homme est un animal comme les autres

Le dernier trappeur, filmé au Canada, est une sorte de documentaire-fiction qui est né de la rencontre entre le réalisateur-explorateur Nicolas Vanier et le trappeur Norman Winther. Le film montre comment Norman Winther et sa femme May Loo parviennent à vivre sans modernité, simplement grâce à la chasse, la pêche et la vente de quelques peaux de bêtes.
Cette vie à des lieues des nôtres a de quoi surprendre et passionner.

Les paysages des Rocheuses sont somptueux, aussi bien en automne avec une profusion de couleurs qu'en hiver avec une importante couche de neige apaisante et pure.
Les relations qu'entretient le trappeur avec la nature sont d'ordre amoureux. Le film pose dès les premières minutes une énorme différence entre le trappeur et les industries. Alors que l'un ne prend que ce dont il a besoin en exercant une chasse artisanale et respectueuse qui participe au maintien de l'écosystème, les autres detruisent massivement des milliers d'hectares de forêt, forçant les animaux à emmigrer et cassant totalement l'écosystème. Le trappeur a donc un rôle utile de régulateur alors que les industries perturbent tout un ordre naturel. Porté par ce type de messages, à la fois simples et capitaux, Le dernier trappeur nous rappelle qu'on tue la terre et qu'il faut arrêter de toujours remettre au lendemain les actions de préservation et de reconstruction de la nature. Il faut redonner à la nature une place prépondérante et vivre en harmonie avec elle plutôt que de la detruire inlassablement.
Le respect de la nature évoqué dans le film va bien plus loin que la simple narration. En effet, les images parlent encore plus que les mots. L'amitié et l'amour passent beaucoup par les relations qu'entretien Norman avec ses chiens de traîneaux et en particulier un husky (Apache). Les moments avec les chiens sont les plus émouvants, montrant la magnifique force, face à des dangers (glace qui se brise, traineau qui se renverse...), qui peut relier deux espèces pas si lointaines. Les rencontres avec les autres animaux, ours, Lynx, carcajous, renards, loups sont à la fois poétiques et impressionnantes.
Outre ces relations, le film de Nicolas Vanier nous présente un homme rare dont les talents sont multiples: chasser, pêcher, diriger un attelage, construire une maison de ses propres mains...
On retiendra aussi le très beau thème principal composé par Krishna Levy et la fin particulièrement touchante qui suggère la suite de l'activité du trappeur par une autre personne à venir...

Il faut aussi mettre l'accent sur la performance de la réalisation de ce film. Le site internet, très complet et captivant, explique l'exploit réalisé : L'année suivante, nous y sommes retournés car nous avons pas réussit à faire les images que nous voulions lors de la première expédition . Depuis plus d'un mois, le blizzard soufflait presque sans discontinuer. Au blizzard succédait la tempête de neige, puis le vent revenait. Impossible dans ces conditions de tourner la moindre image. Pourtant, lorsque l'avion se posa à Inuvik, apportant équipe et caméra, le froid s'étendit sur l'immensité blanche. Un temps calme et sec s'installa. Le thermomètre chuta jusqu'aux abysses du froid et marqua -50°C. C'était l'épreuve du feu pour les caméras que l'équipe image avait testées elle-même dans des congélateurs, en concevant des systèmes sensés permettre de tourner quand, à l'évidence et de l'avis de tous, elles ne pouvaient plus tourner. L'approche et le transport des caméras et de l'ensemble du matériel nécessaire à une prise de vue en 35mm et à ces températures (plus d'une tonne) se fit dans la nuit et à -52°C. La caméra mit une heure à se mettre à température et à ronronner : 8, 10, 20 puis enfin, victoire : 24 images seconde.

Le dernier trappeur est la démonstration d'un mode de vie qui est une vraie philosophie. Le trappeur se considérant comme un animal au même titre que les autres espèces, il respecte, préserve et représente la nature. Le film de Nicolas Vanier est aussi la mise en images de la beauté de la nature. Enfin, Le dernier trappeur est un film dont l'utilité est capitale en nous rappelant que les messages qu'il exprime sont à prendre en compte dès maintenant, et pas dans 1, 5, 10 ou 20 ans.